Je m'arretai un instant devant la porte pour prendre ma respiration. L'instant était grave et j'en mesurai toutes les implications. L'émotion commençait déjà à étrangler ma gorge.
Comment le leur annoncer ? Comment trouver les mots pour leur faire comprendre ma décision ? J'avais répété au moins vingt fois mon speach mais à cet instant précis, je ne me souvenais de rien. Le stress et la peur de les blesser encore davantage me faisaient déjà perdre mes moyens.
"Ressaisis-toi Dan, c'est pas le moment de flancher" pensai-je. "Ils ont droit à des explications".
A l'intérieur, j'entendais quelques voix sourdes, des discussions inquiètes sur les raisons de cette convocation imprévue.
Lorsque je poussai la porte, le silence se fit et je sentis leurs regards se poser sur moi.
"Salut les gars, merci d'être venus". Je fus surpris par le son de ma propre voix; il était beaucoup trop aïgu et trahissait mon émotion.
"J'ai souhaité vous réunir aujourd'hui car j'ai une annonce très importante à vous faire. Je vous demande de m'écouter jusqu'au bout avant de vous exprimer"
" J'ai beaucoup réfléchi à nos dernières prestations sur le terrain. J'ai le sentiment que nous n'y arrivons pas. Les matchs se succèdent et je ne vois toujours aucune amélioration dans notre jeu. Nous faisons beaucoup trop d'erreurs et puis, surtout, les blessures s'accumulent"
Ils m'écoutaient attentivement et je devinai dans leurs yeux une grande détresse. Ils avaient compris mais je continuai.
"Et puis vous ne rajeunissez pas et vous mettez de plus en plus de temps à récupérer entre les matchs. D'autant que le blood bowl est beaucoup plus intense que le rug. C'est pourquoi, j'ai estimé qu'il était de ma responsabilité de mettre un point final à cette folie. J'ai décidé, dans votre intérêt, de ne pas engager l'équipe des saxons dans la ligue. Je sais ce qu...."
Ils ne me laissèrent pas terminer ma phrase. Les cris de joie fusèrent et tous se jetèrent sur moi pour ... me remercier !! J'étais sans voix, incrédule face à ce dénouement improbable. Je venais de mettre fin à leur agonie, à cette peur qui les rongeait depuis des mois lorsqu'ils pénétraient sur le terrain et dont ils n'avaient jamais osé me parler.
Quand je pense aux nuits blanches que je venais de passer à cause de ces bras cassés, angoissé à l'idée de briser leur rêve. En réalité, tout ce dont ils rêvaient était de rentrer à la maison auprès de bobonne et de regarder avec leurs potes les matchs de blood bowl à la télé en sirotant une bière bon marché. Quel programme !
"